La commémoration de la journée mondiale du livre et du droit d’auteur, prévue ce vendredi 23, a été marquée cette année par la publication dans les librairies du livre « Présumé coupable : ma part de vérité » du Général Yamoussa Camara. L’ouvrage qui ravit la vedette aux parutions habituelles au Mali passe à l’analyse des sociologues maliens, dont Dr Moussa Coulibaly.
« Présumé coupable : ma part de vérité ». Il en a fallu moins de 10 jours pour que le livre au titre déjà évocateur suscite la lecture au Mali.
Les Maliens, jusque-là qualifiés d’un peuple qui ne lit pas, ont épuisé les premiers exemplaires tirés en quelques jours. Pourtant avant le livre de l’ancien ministre de la Défense de la transition et l’ex-chef d’Etat-major particulier d’IBK, Général Yamoussa Camara, beaucoup de militaires surtout victimes du régime autocratique de Moussa Traoré avaient écrit pour dire « leur part de vérité » sur les évènements tragiques et douloureux qui ont marqué leur vie de soldat. Selon Dr. Moussa Coulibaly, sociologue, « en général, ces livres parlent aux générations futures, les uns dans un élan de besoin de vérité et de justice, les autres pour appeler au pardon et à la réconciliation à l’image de ceux écrits par capitaine Sounkalo Samaké, ou Samba Sangaré. Quand ces soldats cités écrivaient, leurs geôliers n’étaient plus au pouvoir », rappelle le sociologue.
Est-ce qui explique donc l’intérêt des Maliens pour ce livre « Présumé coupable, ma part de vérité » ? Est-ce que cela dû au parcours de l’auteur ou à la situation actuelle du pays ?
Pour Dr. Moussa Coulibaly, le livre a été écrit pratiquement dans le feu de l’action, au moment où les acteurs de son arrestation et les témoins vivent et son encore acteurs de la sphère politique, judiciaire et militaire. « Pour cette raison, en dehors de cette soif de justice pour l’auteur, on est en droit de penser que c’est une interpellation déguisée qui s’adresse à un certain nombre d’acteurs qui ont déjà commencé à agir (l’ex-ministre de la Justice au moment des faits) », explique-t-il.
Du point de vue de Dr. Coulibaly, ce livre semble avoir des attributs prémonitoires « car le général semble montrer les failles d’un appareil judiciaire en perte de repères (l’affaire est du coup d’État finalement tranché semble avoir le même goût). A ses dires, la popularité de l’ouvrage tient encore plus au fait que celui qui est pointé du doigt par le général, Boubeye, qui est un homme qui est entouré d’un certain mystère ». Pour lui, « les lecteurs attendent ses réactions qui sont déterminantes pour leur permettre de faire leur propre analyse de la situation ».
L’ex-chef d’Etat-major particulier d’IBK, pour sa part, lors de son passage sur le plateau sur la chaîne Africable Télévision, le 18 avril dernier, avait précisé « qu’il voudrait donner, à travers ce livre, seulement l’information qu’il n’a pas eu la chance de donner devant le tribunal, voir sa part de vérité dans l’affaire dite béret rouge ». Une affaire dans laquelle il a était inculpé « pour complicité d’enlèvement, séquestration et assassinats de 21 bérets rouges ».
Dr. Moussa Coulibaly estime que « la parution du livre à quelques mois des élections, au moment où il y a une recomposition du paysage politique après la mort de Soumaïla Cissé n’est pas anodine ; le livre du général libère la parole sur des sujets sensibles et peut contribuer à peser négativement sur ceux qu’ils accusent s’ils restent dans le silence », pense le sociologue.
A l’en croire, « le livre met davantage l’accent sur les dysfonctionnements des procédures particulièrement sur le rôle de la Haute Cour de Justice qui devait s’occuper du cas Yamoussa selon les techniciens du droit », conclut-il.
Kadiatou Mouyi Doumbia
Source: Mali Tribune