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L’impérialisme français : Voilà le plus grand ennemi

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La sécurisation des sources de matières premières et des parts de marché des entreprises françaises d’une part et le besoin de promouvoir son industrie d’armement d’autre part ont ravivé un activisme d’ingérence dont les derniers évènements au Mali ne sont que des illustrations.

 

 

 

Les dangers engendrés par l’impérialisme et par sa politique agressive se sont aggravés. La situation actuelle réclame donc l’unité d’action de toutes les forces vives pour mettre en échec les complots ourdis contre le Mali. Le combat que mène Paris a pour arène la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest, l’Union africaine et l’Union européenne.

 

Le Mali, par la voix de son Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, a remporté des succès devant l’Assemblée générale des Nations-Unies dans le combat pour sa survie qu’il a gagné les esprits et les cœurs dans le monde entier. Les événements au Sénégal, au Burkina et au Niger ont ainsi confirmé la justesse de ce combat.

 

La France veut continuer de mener au Sahel une action politique et économique sans se heurter à la concurrence de la part d’un autre pouvoir étatique. Avec l’assurance d’y trouver des matières premières pour tourner ses usines ainsi que des débouchés pour une partie de ses exportations.

 

Parts de marchés en déclin

 

Un rapide coup d’œil sur les évolutions des importations et des exportations de l’Afrique ces dernières décennies permet d’en conclure à la perte d’influence économique française et européenne sur le continent. Le rapport d’Hervé Gaymard (réalisé pour le ministère de l’Europe et des affaires étrangères) utilise l’expression « déclin relatif » pour qualifier l’évolution des échanges entre l’hexagone et le continent. Ce dernier qui porte un titre significatif « Relancer la présence économique française en Afrique : l’urgence d’une ambition collective à long terme » résume comme suit la situation :

 

Le déclin relatif de la présence économique française sur le continent africain est à la fois massif et soudain. Ce déclin relatif est très net : les parts de marché de la France en Afrique ont été divisées par deux depuis 2001, de près de 12 % à environ 6 % […]. Ce déclin relatif, très net, est d’autant plus spectaculaire que le poids de la France dans le commerce total des marchandises avec l’Afrique s’était maintenu, de 1970 au début des années 2000, autour de 15 %.

 

Le rapport signale que le « déclin des parts de marché françaises est particulièrement marqué en Afrique francophone, de 25 % en 2000 à 15 % en 2017. Une étude de la COFACE (Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur) datée de 2019 précise que tous les grands secteurs d’exportation, à l’exception de l’aéronautique, sont touchés par ce « déclin relatif » : Machines, appareils électriques, pharmacie, automobile, blé, etc. La perte de ces parts de marché selon cette étude provient de « la fulgurante progression de la Chine […] En Afrique de l’Ouest, la percée de la Chine est encore plus notable si l’on inclut Hong Kong, qui s’est imposé comme un acteur important avec des gains de parts de marché de l’ordre de 10 points».La Chine supplante la France au rang de premier exportateur vers l’Afrique en 2007 et l’Allemagne devance la France à la place de premier exportateur européen en 2017. Ces chiffres attestent que de nombreux pays africains ont mis à profit le contexte de « mondialisation Mondialisation (voir aussi Globalisation)

(extrait de F. Chesnais, 1997a)

Jusqu’à une date récente, il paraissait possible d’aborder l’analyse de la mondialisation en considérant celle-ci comme une étape nouvelle du processus d’internationalisation du capital, dont le grand groupe industriel transnational a été à la fois l’expression et l’un des agents les plus actifs.

Aujourd’hui, il n’est manifestement plus possible de s’en tenir là. La « mondialisation de l’économie » (Adda, 1996) ou, plus précisément la « mondialisation du capital » (Chesnais, 1994), doit être comprise comme étant plus – ou même tout autre chose – qu’une phase supplémentaire dans le processus d’internationalisation du capital engagé depuis plus d’un siècle. C’est à un mode de fonctionnement spécifique – et à plusieurs égards important, nouveau – du capitalisme mondial que nous avons affaire, dont il faudrait chercher à comprendre les ressorts et l’orientation, de façon à en faire la caractérisation.

 

Les points d’inflexion par rapport aux évolutions des principales économies, internes ou externes à l’OCDE, exigent d’être abordés comme un tout, en partant de l’hypothèse que vraisemblablement, ils font « système ». Pour ma part, j’estime qu’ils traduisent le fait qu’il y a eu – en se référant à la théorie de l’impérialisme qui fut élaborée au sein de l’aile gauche de la Deuxième Internationale voici bientôt un siècle -, passage dans le cadre du stade impérialiste à une phase différant fortement de celle qui a prédominé entre la fin de Seconde Guerre mondiale et le début des années 80. Je désigne celui-ci pour l’instant (avec l’espoir qu’on m’aidera à en trouver un meilleur au travers de la discussion et au besoin de la polémique) du nom un peu compliqué de « régime d’accumulation mondial à dominante financière ».

 

La différenciation et la hiérarchisation de l’économie-monde contemporaine de dimension planétaire résultent tant des opérations du capital concentré que des rapports de domination et de dépendance politiques entre États, dont le rôle ne s’est nullement réduit, même si la configuration et les mécanismes de cette domination se sont modifiés. La genèse du régime d’accumulation mondialisé à dominante financière relève autant de la politique que de l’économie. Ce n’est que dans la vulgate néo-libérale que l’État est « extérieur » au « marché ». Le triomphe actuel du « marché » n’aurait pu se faire sans les interventions politiques répétées des instances politiques des États capitalistes les plus puissants (en premier lieu, les membres du G7). Cette liberté que le capital industriel et plus encore le capital financier se valorisant sous la forme argent, ont retrouvée pour se déployer mondialement comme ils n’avaient pu le faire depuis 1914, tient bien sûr aussi de la force qu’il a recouvrée grâce à la longue période d’accumulation ininterrompue des « trente glorieuses » (l’une sinon la plus longue de toute l’histoire du capitalisme). Mais le capital n’aurait pas pu parvenir à ses fins sans le succès de la « révolution conservatrice » de la fin de la décennie 1970.  » et la multilatéralisation du monde qui l’accompagne pour sortir du face-à-face contraint avec l’ancienne puissance coloniale, a signalé Saïd Bouamama sur son blog personnel. Ils ont diversifié leurs échanges en s’appuyant sur les pays dits « émergents » et en particulier sur la Chine pour desserrer le carcan de la relation de dépendance caractéristique du colonialisme et du néocolonialisme. Ils ont mis en œuvre la logique de la « concurrence libre et non faussée » de la mondialisation capitaliste en la retournant contre un de ses promoteurs importants : la classe dominante française.

 

Diabolisation des concurrents

 

Les réactions ne tardèrent pas. Elles prirent de multiples formes. En premier lieu elles s’orientèrent vers des campagnes idéologiques diverses du type la Chine et les Ouïgours, la mauvaise qualité des produits chinois, le nouvel impérialisme chinois, dont la finalité est de diaboliser les concurrents actuels des entreprises françaises en Afrique, note Saïd. Elles prirent ensuite la forme des promesses politiques de réformes tous azimuts des rapports franco-africains : promesse de sortie de la Françafrique, reconnaissance timide des massacres coloniaux, discours du « responsable mais pas coupable » à propos du génocide au Rwanda, annonce de la réforme du Franc CFA pour le remplacer par l’ECO, etc. Elles prirent enfin la forme d’un changement de doctrine militaire pour lutter contre le « terrorisme », la réaction ulcérée contre les rumeurs persistantes de négociation de contrat avec Wagner, une société paramilitaire russe. Cumulée ces différentes réactions démontrent l’ampleur de la crise actuelle de l’impérialisme français, ravalé plus que jamais au rang d’impérialisme secondaire et menacé de perdre son dernier atout dans les négociations avec les autres impérialismes : son « pré-carré » malien. Le vocabulaire du rapport au ministre des affaires étrangères « Déclin relatif », « massif et soudain », « spectaculaire », « urgence », entre autres est significatif de l’importance de cette crise conduisant à un diagnostic d’alarme porteur de nombreux dangers pour la paix et le développement économique du Mali.

 

Activisme accru

 

La même période qui voit se déployer ce « déclin relatif » se caractérise en effet également par un changement de la doctrine militaire française. Le livre blanc de la défense de 2013 s’inquiète ainsi de la « montée en puissance des pays émergents Pays émergents Les pays émergents désignent la vingtaine de pays en développement ayant accès aux marchés financiers et parmi lesquels se trouvent les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Ils se caractérisent par un « accroissement significatif de leur revenu par habitant et, de ce fait, leur part dans le revenu mondial est en forte progression ». , en particulier celle du Brésil, de l’Inde et de la Chine ». Il alerte sur le fait que ces nouveaux concurrents « ne se limitent plus aux seuls produits énergétiques et aux matières-premières ». Il met en garde également sur l’activisme du concurrent états-unien sur le continent : « [Les États-Unis] continuent de s’intéresser à cette zone comme en témoigne la création d’un commandement spécialisé – Africom. » Il déduit ensuite de ce diagnostic des axes stratégiques prioritaires de défense vers « le Sahel, de la Mauritanie à la Corne de l’Afrique, ainsi qu’une partie de l’Afrique subsaharienne [qui] sont également des zones d’intérêts prioritaires pour la France, en raison d’une histoire commune, de la présence de ressortissants français, des enjeux qu’elles portent et des menaces auxquelles elles sont confrontées ». Il conclut enfin à la nécessité d’une intervention militaire directe plus forte, plus durable et plus fréquente dans ces « zones stratégiques » : « L’évolution du contexte stratégique pourrait amener notre pays à devoir prendre l’initiative d’opérations, ou à assumer, plus souvent que par le passé, une part substantielle des responsabilités impliquées par la conduite de l’action Action

Actions Valeur mobilière émise par une société par actions. Ce titre représente une fraction du capital social. Il donne au titulaire (l’actionnaire) le droit notamment de recevoir une part des bénéfices distribués (le dividende) et de participer aux assemblées générales.  militaire. »

 

Un autre point saillant du livre blanc de la défense de 2013 a trait au renforcement de la production d’armement présentée comme un des atouts importants des capacités de défense française. Cette production, rappelons-le, a besoin de guerres pour se maintenir. Dans les salons où se négocient les contrats de vente d’armements entre États, l’industrie française peut mettre en avant comme arguments de vente des produits des expérimentations pratiques en Afrique. La France est ainsi en 2020 le troisième exportateur d’armes dans le monde avec 8.2 % des exportations mondiales. De même les exportations françaises ont bondi de 44 % entre 2016 et 2020. Les profits des grands groupes français sont logiquement faramineux : Thalès [8.56 milliards d’euros en 2018] ; Naval group [3.81 milliards] ; Safran [2.93 milliards] ; Dassault [2.65 milliards] ; le Commissariat à l’Énergie atomique [2.08 milliards] ; etc.

 

L’impérialisme français est plus actif et plus agressif. D’ailleurs, la sécurisation des sources de matières premières et des parts de marché des entreprises françaises d’une part et le besoin de promouvoir son industrie d’armement d’autre part ont ravivé un activisme d’ingérence dont les derniers évènements au Mali ne sont que des illustrations.

 

Fanfan

 

Source: L’Informateur

 

 

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